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Chaumont-Photo-sur-Loire, nature et nouvelles technologies

Chaumont-Photo-sur-Loire, nature et nouvelles technologies

Au coeur d’un imposant château de la Loire, une exposition révèle jusqu’au 28 février de mystérieuses photographies. Un feuillage pixelisé, des glaciers en négatifs, des jardins inversés, d’étranges empreintes lumineuses… Les auteurs de ces photographies ont en commun le goût des grands espaces ainsi qu’un appétit pour l’expérimentation.

Pour la deuxième année consécutive, le Centre d’arts et de nature du domaine de Chaumont-sur-Loire organise une exposition collective invitant cinq photographes à partager leur vision de la nature et du paysage.

Cette initiative originale nous invite non pas à observer le paysage contemporain, mais nous plonge dans un univers parallèle où la nature est explorée à l’aune des nouvelles technologies. De l’utilisation de « solargraphes » à l’emploi de scanner 3D, ces faiseurs d’images expérimentent une nouvelle façon de photographier en s’aventurant aux confins d’un médium en constante mutation.
Chaumont Photo sur Loire

© Château de Villandry, 2018 ©Alex MacLean pour le Domaine de Chaumont-sur-Loire

Revisiter un domaine historique

Fidèle à la tradition de la commande artistique propre à la Renaissance – époque à laquelle fût reconstruit le château –  le Centre d’art a convié trois des cinq artistes invités à effectuer une résidence pour qu’ils proposent leur vision du domaine. L’américain Robert Charles Mann est ainsi venu poser ses « solargraphes » à différents endroits pour recueillir pendant six mois l’empreinte mouvante des courbes du soleil. Adepte des procédés photographiques anciens comme le sténopé, il appartient à cette génération de photographes qui revisite la photographie dite « primitive » ou « anténumérique » pour en révéler le caractère expressif et poétique.

Chaumont-Photo-sur-Loire Robert Charles Mann

Impressions solaires, 2018 © Robert Charles Mann

Chaumont-Photo-sur-Loire Robert Charles Mann

Impressions solaires, 2018 © Robert Charles Mann

À l’opposé de cette approche, le photographe italien Davide Quayola expérimente une pratique hybride mêlant photographie et algorithmes. Ses tirages grand format en haute résolution sont réalisés à l’aide d’un scanner 3D qui est parvenu à capter un nombre considérable de données. Des images singulières illustrent ici la confrontation entre réel artificiel. Il parvient à révéler, selon la commissaire de l’exposition Chantal Colleu-Dumond, « la géométrie des arbres et la complexité de la nature, en quelque sorte, l’essence dont sont faites les choses ». 

Chaumont-Photo-sur-Loire Davide Quayola

Impressions végétales, 2018 © Davide Quayola

Chaumont-Photo-sur-Loire Davide Quayola

Impressions végétales, 2018 © Davide Quayola

La géométrie des châteaux  la Loire est également explorée par le photographe américain Alex McLean qui, du haut d’un avion, réalise des photographies à la teinte surréaliste jouant sur des effets d’échelles, de reflets et d’inversion des repères.

Chaumont-Photo-sur-Loire Alex MacLean

Château de Chenonceau, 2018 © Alex MacLean pour le Domaine de Chaumont-sur-Loire

Réactualiser un thème intemporel

Thème intemporel de l’histoire de l’art, la nature est souvent vécue par les artistes comme une expérience sensorielle. La matérialité de la végétation constitue pour eux un enjeu esthétique autant qu’un défi technique. C’est ce que tentent ces photographes, chacun à leur manière, face à une nature hostile et fugace.
Fasciné par le feuillage des arbres et le changement perpétuel de la lumière, l’artiste finlandais Santeri Tuori photographie de manière obsessionnelle et systématique les mêmes endroits avec le même angle, saison après saison. Ces surimpressions créent des tableaux saisissants dont le rendu oscille entre imagerie moderne et peinture impressionniste.

Santeri Tuori, Forest #34, 2017, From the series Forest Series © the artist, courtesy Gallery Taik Persons

Santeri Tuori, Forest #35, 2017, From the series Forest Series © the artist, courtesy Gallery Taik Persons

Juliette Agnel – présentée comme une « aventurière du regard » – poursuit, elle, son exploration des paysages extrêmes. De son expédition au Groenland, elle ramène des photographies grand format représentant la puissance et l’hostilité des glaciers. Alternant entre pratique numérique et argentique, elle s’amuse à traverser l’histoire du médium photographique. L’esthétique du négatif entre ici en collision avec le dispositif contemporain du caisson lumineux, comme le spectateur se heurte à ces majestueuses Portes de glace.

Les Portes de Glace, 2018, 120 x 150 cm, Tirages fine art mat sur papier, Hahnemülhe, Groenland © Juliette Agnel

Les Portes de Glace, 2018, 120 x 150 cm, Tirages fine art mat sur papier, Hahnemülhe, Groenland © Juliette Agnel

L’influence des nouvelles technologies sur notre regard a  fait l’objet de nombreuses études. Parmi elles, l’ouvrage de Monique Sicard La fabrique du regard décrypte la manière dont le progrès technique a transformé notre perception du monde.
L’invention des premières imageries de transmission à la fin du XIXe siècle a, par exemple, influencé la création artistique en donnant à voir l’intérieur du corps humain.
De la même manière, cette exposition témoigne d’une époque profondément marquée par l’ingéniosité des nouvelles technologies tout en se faisant le reflet des nouvelles explorations photographiques.

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