Sur les photos, ce sont toujours elles, Elsa et Johanna, dont la rencontre remonte à 2014 à la School of Visual Arts de New York. Et même si leur première série s’intitule A couple of them (2015), cela n’en fait pas pour autant des autoportraits. C’est plus complexe que cela. De même, derrière l’apparente simplicité des saynètes, se cache un minutieux travail de mise en scène où chaque détail – vêtements, poses, lieux, etc. – est le résultat d’une longue réflexion.
« Nous faisons des images comme on ferait un film », raconte Johanna ; « Notre but est d’atteindre une certaine vérité », complète Elsa. Pour y parvenir, elles font plus qu’endosser un rôle d’actrice et camper des personnages qu’elles considèrent comme des « extensions d’elles-mêmes ». Leurs faux instantanés sont composés d’un savant mélange : un concentré de réel qu’elles observent attentivement et dont elles s’imprègnent, un zeste de leur vécu et de leur ressenti personnels mais aussi des influences qu’elles revendiquent volontiers, de Jeff Wall à René Magritte en passant par Diane Arbus.
Comme leur première série, Beyond the shadows – initiée en 2018 et rassemblant plus de 80 images articulées en trois parties – aborde le couple, l’identité et le genre… Mais cette fois, les plans sont plus larges, laissant aussi à voir les paysages de Calgary, et les formats verticaux cèdent la place à des horizontaux. L’intention demeure : convoquer notre propre mémoire et, grâce à ce sentiment de “déjà vu”, créer un trouble pour réveiller nos émotions les plus enfouies. « Parler du passé, du présent et du futur. Donner à vivre une expérience », conclut Elsa.
Par Sophie Bernard
ART PARIS 2020