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Comment la photo a envahi Bruxelles (dé)confinée

Comment la photo a envahi Bruxelles (dé)confinée

1000 photos, 50 photographes, 4 semaines de montage express, une exposition à l’échelle urbaine et 174 000 visiteurs. Depuis juin dernier, les rues de Bruxelles se sont muées en cimaises d’une exposition à ciel ouvert, où la photographie belge a éclipsé ça et là l’affichage publicitaire. Ce projet s’appelle EXI(S)T et nous rappelle encore une fois que la culture est un lieu de résistance aux crises que nous traversons.

Vue de l’exposition © Charlotte Jean

« Pendant le confinement et le déconfinement, les panneaux publicitaires étaient de plus en plus déprimants : ils annonçaient des spectacles qui avaient déjà eu lieu depuis longtemps, ou qui n’auraient jamais lieu ! » En se promenant au mois de mai dans les rues de Bruxelles, Lise Bruyneel, iconographe pour l’opéra et le spectacle vivant, a une idée. Pourquoi ne pas réenchanter l’espace public, en remplaçant les affiches d’événements tristement obsolètes par des photographies ?

C’est ainsi qu’est né EXI(S)T, un parcours photographique dans Bruxelles (dé)confinée. La jeune bruxelloise contacte Artepub, le réseau d’affichage culturel à Bruxelles. Oui, les espaces publicitaires seront bien mis à disposition pour cet ambitieux projet ! Elle appelle des dizaines de photographes, belges ou résidant en belgique, sélectionne les oeuvres, lève des fonds (13 000 euros), crée un site et une carte interactive pour identifier les lieux d’exposition et les artistes.


© Dries Segers / © Sarah Van Marcke

Un subtil fil rouge

Une fille assise de dos devant sa fenêtre, un homme serrant fort son chat, une femme alanguie d’ennui ou de mélancolie sur son canapé… Difficile de ne pas voir dans ces photos le spectre de la période que nous traversons. Le fil conducteur entre les images est corrélé à l’actualité, « il résonne avec l’étrange situation que nous vivons », sans que cela soit trop évident « on a déjà beaucoup d’informations liées au Covid dans la rue, des affiches, de la signalétique, des messages nécessaires mais un peu oppressants » ajoute la commissaire. 

On y découvre des « photographes encore étudiants ou bien établis, d’autres plus âgés, qui n’ont pas de site internet ». A l’heure où la distanciation physique est de rigueur, on observe dans ce parcours une grande diversité d’images, de couples s’embrassant, de contacts humains, de liens sociaux, de souvenirs de vacances, et des sujets abstraits, qui invitent à l’évasion. 

Les photographies sont disséminées dans l’espace public. Parking à vélos, devantures de magasins, terrasses de cafés – « de vrais cafés de quartiers, pas que des cafés branchés ! » précise-t elle, sont autant d’endroits collectifs où se tient l’exposition, comme des fenêtres ouvertes sur la culture. La ville a été découpée en secteurs, de manière à ne pas tomber sur les mêmes photos au sein d’un quartier.


Vue de l’exposition © Charlotte Jean

Une expérience artistique alternative

Chacun·e est libre de créer son propre itinéraire dans le parcours, muni.e de la carte interactive ou au hasard de ses déplacements. Comme Sarah, habitante du quartier Saint-Gilles, qui a mis du temps à remarquer l’exposition, et suit à présent sur instagram les artistes qui l’inspirent « Je prenais un café en terrasse du Robinet, et j’ai remarqué ce grand format très touchant de Vincen Beeckman, d’un couple de SDF, Claude et Lilly, qui s’embrassent. Depuis je m’arrête quelques secondes pour regarder les photos et noter les insta des photographes que j’aime bien. »

En ces moments d’incertitude, où les évènements culturels sont mis à mal, qu’est-ce qui pousse les photographes à participer à un tel projet ? « C’est Lise ! On ne se connaissait pas personnellement, mais elle suivait mon travail depuis longtemps » confie Charles Paulicevich. Photographe spécialisé dans le cinéma, il expose au sein d’EXI(S)T deux clichés qui sentent bon les vacances. « Elle a un entrain ahurissant (…) et fatalement, c’est envoûtant comme projet ! »

Petit à petit, certaines photographies commencent à se détériorer, d’autres sont remplacées par des affiches publicitaires d’événements qui ont bien lieu. Un projet éphémère donc, jusqu’à un certain point : Lise Bruyneel et les photographes sont déjà en train de travailler sur le catalogue a posteriori de l’exposition !


© Charles Paulicevich

© Joseph Charroy

Vue de l’exposition © Charlotte Jean

© Linde Radeschelders

© Lara Gasparotto

Par Charlotte Jean

Exi(s)t

A partir du 13 juin 2020 à Bruxelles (Belgique)

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