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Quatre photographes qui redonnent des couleurs à l’architecture

Quatre photographes qui redonnent des couleurs à l’architecture

L’architecture, du monument dans son ensemble au détail de construction, est un sujet de prédilection sur Instagram. Blind a sélectionné quatre photographes d’architecture qui y célèbrent la couleur.

Puisque la ville appartient à tout le monde, l’architecture constitue un terrain de jeu et d’inspiration infini pour les photographes, qu’ils soient professionnels ou amateurs. La photographie d’architecture documente aujourd’hui le renouveau urbain comme les vestiges du passé. Elle est ce qu’on retient d’un bâtiment qu’on n’aurait pas vu en vrai. Ainsi l’œil du photographe va souvent déterminer l’imaginaire collectif autour d’un bâtiment. En voici quatre, qui ont pour trait commun de considérer la couleur comme un matériau à part entière de l’architecture.


Tekla Evelina Severin, la plus color addict

© Tekla Evelina Severin

Lassée par la monotonie linéaire blanche et beige du design scandinave, l’architecte d’intérieur suédoise Tekla Evelina Severin procède à un tournant « coloriste », en explorant des matériaux et des couleurs à l’opposé de l’esthétique nordique. Dans la foulée, elle devient photographe d’architecture, traversant le monde à la recherche de constructions qui jouent, comme elle, avec les couleurs. 

«Tout est susceptible de m’inspirer (…) mais si je devais choisir une influence, ce serait la lumière du soleil ! C’est la base créatrice de ma photographie », nous confie l’artiste, dont la pratique est multidisciplinaire, à la croisée du design, du stylisme et de la photographie. 

Le compte instagram de cette color addict, comme elle aime se définir, offre une profusion d’extérieurs vibrants et pastel, et d’intérieurs colorés où elle se met en scène. Sa richesse et son originalité ont beaucoup joué sur la carrière de Tekla Evelina Severin: « Instagram est devenu une plateforme et a changé la donne pour moi : j’ai reçu de plus en plus de commandes, passant petit à petit d’employée à 100% freelance en 2015 ».

On y reconnaît à la fois l’influence de l’architecte catalan Ricardo Bofill, dont elle loue « la vision déconstructiviste, sculpturale et géométrique », et d’architectes plus émergents et ludiques comme les portuguais de l’atelier Fala. 

© Tekla Evelina Severin

Matthieu Venot, le plus californien

© Matthieu Venot

Matthieu Venot n’a pas toujours été photographe d’architecture. Ingénieur du son dans l’industrie musicale, il se met à la photo à l’âge de 35 ans lorsqu’il retourne vivre à Brest, sa ville natale. « Je me suis dit que je ne la connaissais pas du tout. Du coup je me suis mis à arpenter les rues pour mieux connaître ma ville. J’en ai profité pour partager ma vision sur les réseaux sociaux. » Il considère le ciel comme son studio, un fond pour ses photographies. Elles mettent à l’honneur l’architecture polychrome à différentes échelles : un détail de balcon, un angle, un bâtiment décliné sur plusieurs plans. « Ce qui m’importe en premier, ce sont les couleurs et les formes simples », tranche-t-il. Son compte instagram est une ballade urbaine, optimiste et pastel, qui sème le trouble. Des clichés rose, jaune, bleu clair de Brest ou d’autres villes en Bretagne se confondent avec d’autres de Los Angeles ou Miami, sans qu’on puisse les distinguer.

On peut aussi voir ses photos sur papier, dans un livre que Matthieu Venot vient de publier aux éditions Autonomes, La cité d’angles. Et à la Bibliothèque Universitaire de Brest jusqu’au 11 décembre, où 800 de ses clichés d’architecture sont rangés par couleurs.

© Matthieu Venot

Roc Isern, le plus urbain

© Roc Isern

L’objectif de Roc Isern n’épargne aucun aspect de sa ville natale, Barcelone. Des monuments gothiques au modernisme catalan, en passant par l’urbanisme rationalisé du quartier de l’Eixample et des landmarks contemporains comme la tour Agbar de Jean Nouvel, toute l’architecture barcelonaise est passée au crible. Et exposée sur ses deux comptes instagrams très suivis, stoptheroc et barcelonafacades.

Architecte de formation, il arpente la ville en s’isolant du monde, casque sur les oreilles, pour se concentrer sur les façades et ce qui s’y passe. Ondulations de la lumière, linge aux fenêtres, dialogue entre matériaux, motifs colorés, décors kitsch ou somptueux … Son bâtiment favori à Barcelone ? Probablement le MACBA, le musée d’art contemporain signé par Richard Meier dans les années 1990. « J’aime son design géométrique et la grande place accordée à la couleur blanche », observe-t-il.

Son succès sur les réseaux sociaux lui a ouvert les portes des commandes de photos d’architecture. Cependant, la crise actuelle a une incidence sur ses projets: « Je n’ai pas de projet photo très excitant en ces temps difficiles. Ces jours-ci, je suis plutôt concentré sur mon travail d’architecte. J’espère que l’été prochain, je pourrai voyager de nouveau et reprendre les commandes de photo d’architecture. »

© Roc Isern

Jeanette Hägglund, la plus minimaliste

© Jeanette Hägglund

Ses premiers clichés, Jeanette Hägglund les réalise à l’âge de 8 ans. Aujourd’hui photographe professionnelle, elle porte une attention particulière au rendu minimaliste de ses images. La pureté des formes, des lignes et des couleurs prévaut sur tout effet de style. Bien qu’elle ne soit pas uniquement spécialisée en architecture – le portrait est un genre qu’elle affectionne tout autant, c’est celle-ci qui occupe la majorité de son compte instagram. Son admiration va d’abord à Zaha Hadid, dont elle aime « les formes organiques et l’apparence dynamique des bâtiments ».

La photographe s’est récemment rendue à Doha pour shooter deux bâtiments d’envergure, le National Museum of Qatar de Jean Nouvel, et le Museum of Islamic Art conçu par I.M. Pei. Elle nous livre son ressenti face à ces deux mastodontes à la géométrie opposée : le premier « ressemble à une rose des sables, absolument incroyable », le second « présente des formes dures et une géométrie remarquable, soulignée différemment selon le moment de la journée ».

© Jeanette Hägglund

Par Charlotte Jean

Charlotte Jean est journaliste et auteure. Ancienne collaboratrice de Beaux Arts Magazine et fondatrice de Darwin Nutrition, elle est diplômée de l’Ecole du Louvre et spécialisée en art contemporain.

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