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Focus sur le secteur Curiosa à Paris Photo

Focus sur le secteur Curiosa à Paris Photo

Portant bien son nom, le secteur Curiosa est axé sur les nouvelles tendances et pratiques photographiques contemporaines. Il fourmille de curiosités. Nos coups de cœur.
Karolina Wojtas, From the series Abzgram, 2017 © Galerie Vasli Souza

Créé en 2018, le secteur Curiosa est dédié aux artistes émergents et/ou aux à des jeunes galeries qui présentent toutes des solo shows. L’objectif est de donner un coup de pouce aux nouvelles générations qui, d’une certaine façon, représentent l’avenir et les grands artistes de demain. « Il est important de se projeter… C’est la raison pour laquelle les galeries qui exposent à Curiosa ont un prix d’accès plus intéressant », souligne Florence Bourgeois. 

Cette année, ce secteur prend de l’ampleur, passant de quatorze à vingt participants dont certains exposeront en France pour la première fois. Sa direction artistique a été confiée à Shoair Mavlian, directrice de Photoworks, une plateforme en ligne dédiée au médium. Auparavant conservatrice adjointe de la photographie à la Tate Modern, elle y a notamment co-organisé l’exposition « Conflict, Time, Photography » en 2014.

John Yuyi, All You See Is Me, 2019 © Over the Influence

Qu’ils appartiennent à la nouvelle pratique documentaire, abordent l’intime, la mémoire, ou l’histoire, les vingt artistes originaires de onze pays réunis dans Curiosa ont en commun une approche originale si ce n’est expérimentale de la photographie. L’autoportrait y tient une place de choix, comme dans le travail de la taïwanaise John Yuyi. Se qualifiant d’artiste post-internet, elle élabore des photomontages mettant en scène différentes parties de son corps. Étranges pour certains, prêtant à rire pour d’autres, ses tableaux visuels présagent d’un monde futuriste, entre cyborg et transhumanisme.

De son côté, Gosette Lubondo, découverte dans l’exposition « A toi appartient le regard… » au musée du quai Branly l’année dernière, apparaît en surimpression errant dans des lieux abandonnés dans sa série « Imaginary trip ». Cette Congolaise autodidacte réfute pourtant le terme d’autoportrait parce que ce n’est pas tant elle-même qu’elle cherche à représenter que des personnages. Tel un fantôme, elle hante des lieux témoignant du passé colonial.

Gosette Lubondo, Imaginary Trip II #2, 2018 © Galerie Angalia
Kincső Bede, Three Colours I Know in This World © Tobe Gallery

Une autre forme d’étrangeté règne dans les portraits déjantés de la Polonaise Karolina Wojtas où l’on peut voir des enfants dans des situations saugrenues. Marquée par le système éducatif polonais extrêmement strict et directif, elle laisse dorénavant sa seule imagination et créativité dicter son travail artistique. Décapant. Tout comme l’univers en noir et blanc de Kincső Bede, aussi originaire d’Europe de l’Est, entre surréalisme et absurde. Quand le réel est trop difficile à supporter, l’imaginaire est un formidable refuge semblent nous dire ces artistes.

Cette règle s’applique aussi au travail de José Guerrero qui a quant à lui choisi l’abstraction. Il photographie des modèles d’architectures miniatures qu’il retravaille en post-production. Lui aussi brouille les pistes, jouant sur l’interpénétration du réel et de la fiction.

José Guerrero, BRG-037, 2021 © Alarcón Criado
Mark Mahaney, Polar Night #05, 2019 © Galerie Kominek

De leur côté, les images de la nuit polaire que Mark Mahaney capte à Utqiagvik, la ville la plus au nord de l’Alaska, sont bien une représentation du réel. Pourtant, l’univers qu’elles décrivent, à la fois fascinant et inquiétant, sème le doute dans nos esprits et semble appartenir au registre de la fantasmagorie.

Par Sophie Bernard

Sophie Bernard est une journaliste spécialisée en photographie, contributrice pour La Gazette de Drouot ou le Quotidien de l’Art, commissaire d’exposition et enseignante à l’EFET, à Paris.

Plus d’informations sur Curiosa sur le site de Paris Photo.

Vladyslav Krasnoshchok, Untitled, Timoshenko’s Escape series, 2012 © Alexandra de Viveiros Gallery
Yael Burstein, Untitled (sofa figures), 2019 © Charlot

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