EN IMAGES
Le chant des sirènes
Sous les projecteurs des cabarets normands, Frédéric Stucin s’aventure dans les coulisses de la métamorphose. Entre paillettes et solitude, il dresse le portrait d’un monde fragile, suspendu entre la scène et la vie, où les identités se défont et se recomposent à la lueur des néons.
Par Jonas Cuénin. Photos de Frédéric Stucin.
La nuit s’avance sur Deauville. Dans une salle de bal, les voix s’échauffent, les corps se maquillent, les perruques s’ajustent. Les coulisses deviennent un territoire d’attente et de promesses. Avant que la lumière n’arrive, il y a ce moment d’entre-deux — presque sacré — où l’on se prépare à être vu. Frédéric Stucin capte cet instant où l’artifice devient vérité.
Sur les routes de Normandie, le photographe a suivi la trace des cabarets et des bars dansants. Des voix, des rires, des refrains éraillés flottent dans la brume du soir. Devant son objectif, les artistes se tiennent debout, les yeux rivés à la caméra. Ils ne jouent pas, ils existent — entre la fatigue et la fierté. Leurs corps racontent l’histoire d’un monde à la fois minuscule et immense.
Dans la station balnéaire, tout semble propre et cadré, mais derrière les façades, d’autres vies s’inventent. Stucin explore ces marges, ces lieux éphémères où la fête devient nécessité. La mer est tout près, invisible, et on entend son souffle dans les images. Une forme de mélancolie s’installe, non pas la tristesse, mais la conscience aiguë du passage.
Ce qui attire Frédéric Stucin, c’est la vibration du réel — ce moment où la chair et le décor se confondent. Ici photographe du trouble et de la proximité, il ne juge pas, il accompagne. Ses images ne montrent pas le spectacle, elles le murmurent.
« Le Chant des sirènes », de Frédéric Stucin, est une série inédite réalisée en résidence à Deauville dans le cadre du Festival Planches Contact 2025. Elle y est exposée jusqu’au 5 janvier 2026.