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DERRIÈRE L’IMAGE - Les larmes de Sainte Lio

DERRIÈRE L’IMAGE – Les larmes de Sainte Lio

À l’occasion de l’exposition La Fabrique des idoles de Pierre et Gilles à la Philharmonie de Paris, Blind décrypte une image de ce duo d’artistes qui n’a cessé d’immortaliser les grands noms de la musique, à travers ses portraits photo-peinture d’un nouveau genre.

Tout droit sortie d’un recueil bon marché d’images pieuses, difficile d’imaginer qu’il s’agit d’une photographie repeinte. Et davantage encore, que cette madone n’est autre que le portrait de la chanteuse et actrice française Lio. L’art du détournement, le duo d’artistes Pierre et Gilles le maîtrise à merveille, puisqu’il s’y adonne à travers ses portraits photographiques-peints depuis 1976. Les années 1980 et la boîte de nuit Le Palace à Paris ont été la première formation de ce binôme habitué du monde du showbiz et de la musique. Ensemble, les deux compères illustreront de nombreuses pochettes d’albums, comme le fameux portrait du chanteur Étienne Daho au perroquet de La Notte la notte


La Madone au cœur blessé, Lio, Collection François Pinault © Pierre et Gilles

En 1991, Pierre et Gilles font poser Lio vêtue en madone, affublée des attributs de la sainteté les plus baroques, pleurant à larmes cristallines et tenant contre elle son cœur visiblement meurtri. Des représentations religieuses et des figures érigés en icônes, Pierre et Gilles ont une obsession dévorante, qu’ils renouvelleront sans cesse durant leur carrière. Mais parmi tous les saintes, madones et martyrs qu’ils ont fait rejouer à leurs modèles, cette Madone au cœur blessé qu’interprète Lio est sans doute parmi les plus fascinantes.

Fascinante parce que peu reconnaissable, elle peut être aisément fantasmée en véritable figure de piété, assaillie par une tristesse si immense qu’elle en est, naturellement, bouleversante. Fascinante également parce qu’elle prend place dans un décorum qui, s’il est baroque, ne laisse pas transparaître les marques habituelles du kitsch du duo. Au contraire, ses accessoires, son fond et son imposant cadre doré répondent à tous les codes de la représentation religieuse et métamorphosent définitivement la star en sainte. Ce n’est plus la fabrique d’une idole, mais bien d’une icône. 

Par Anne Laurens

Pierre et Gilles, La fabrique des idoles

Du 20 novembre 2019 au 23 février 2020

Musée la musique – Cité de la musique 

221 Avenue Jean Jaurès, 75019 Paris

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