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DERRIÈRE L’IMAGE - Au fil de l'eau

DERRIÈRE L’IMAGE – Au fil de l’eau

À l’occasion de l’exposition Arno Rafael Minkkinen: Fifty Years à la Edwynn Houk Gallery, Blind décrypte une image de ce photographe d’origine finlandaise ayant fait de son corps en pleine nature son terrain de recherches favoris.

Il y a quelque chose de messianique dans la photographie d’Arno Minkkinen : suspendu au-dessus du vide, courant à la surface de l’eau, ou encore grimpant à une jambe aux arbres, on peine à croire à la possibilité de ces images comme venant d’un seul homme. Il s’attache pourtant, depuis cinquante ans, à travailler avec la seule aide de son retardateur, refusant toute intrusion du digital dans sa photographie. 


Fosters Pond, 2000 © Arno Rafael Minkkinen, Courtesy of Edwynn Houk Gallery

Réalisée en 2000, Fosters Pond ne fait pas exception aux mantras du photographe, signant toute l’originalité de son œuvre. Oscillant entre absurdité du cliché et poésie de la métaphore dont il recèle, ce portrait de main nous autorise autant à percevoir la dimension performative du travail de Minkkinen que l’importance du lien tissé entre l’homme et la nature. Si la prouesse technique tient ici à défier la quiétude des eaux pour faire éclore la main et son reflet, la photographie est aussi fascinante pour le labyrinthe de sens qu’elle charrie. 

Dans son élément, d’abord, la main épouse l’étendue d’eau et fait – littéralement – corps avec son environnement. Le lien à la nature, patiemment re-tissé par le photographe, se dénonce dans l’osmose qui en ressort, et retentit sur la perfection du cliché. Le portrait de main, ensuite, nous conduit d’images en images, la main « écrivant » sur une page bien peu conventionnelle. On peut ainsi y voir aussi bien le symbole de la trace de l’homme sur son environnement que celui de l’acte créatif – écriture ou photographie – renvoyant incessamment au créateur son propre reflet. Le portrait s’avouerait-il toujours autoportrait ? Rien n’est moins sûr, mais si la main renvoie l’artiste à son geste, elle le confronte aussi à ses limites. Celles-ci mêmes que Minkkinen a systématiquement cherché à repousser. 

Par Anne Laurens

Arno Rafael Minkkinen: Fifty Years

4 janvier – 8 février 2020

Edwynn Houk Gallery, 745 5th Ave #407, New York, Etats-Unis

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