Julien Mauve, miracle et menace du magma

Lorsqu’il se rend dans la ville de Naples, Julien Mauve est frappé par quelque chose qui couve et qui se sent partout sans être vraiment visible : la menace tacite des volcans qui peuvent soudain cracher des quantités de lave et engloutir les habitations de plus en plus nombreuses dans la baie. Il y a bien sûr le Vésuve, qui trône à côté de la ville, mais aussi, moins connus, les Champs Phlégréens, zone volcanique située à environ 9 kilomètres de Naples. Ces deux volcans sont actifs et peuvent potentiellement toucher toute la région avec des éruptions brutales et soudaines. 

« Il y a plusieurs aspects qui m’ont intéressé avec ce sujet », explique Julien Mauve, « l’aspect scientifique, l’aspect religieux et l’aspect politique ». De fait, le photographe s’est plongé dans l’esprit subtil et volatil qui flotte dans la baie de Naples. Un mélange fait d’espoirs et de craintes, de constats scientifiques et d’incertitudes humaines. « Il y a par exemple une fête religieuse au mois de septembre qui consiste à prédire si les volcans vont ou pas se réveiller », raconte Julien Mauve qui a choisi de baptiser sa série Il Miracolo (« Le miracle »). 

« Napoli »

« C’est à la fois une menace et une bénédiction ces volcans », poursuit-il avant d’affirmer que « les gens de la baie de Naples ont appris à vivre avec ». Alors le photographe s’est rendu dans divers lieux marqués par la présence évanescente des volcans. Il y a ce restaurant où un tableau représente une éruption volcanique ancienne. Il y a ce lieu de prière où les gens se rassemblent au pied d’une statue. Il y a ces images scientifiques prises dans un poste d’observation des volcans, une « control room », où Julien Mauve a réussi à entrer. 

Parfois, c’est le visage d’un habitant que nous croisons dans cette série photographique, comme cet homme au regard intense qui porte un T-shirt avec le mot « Napoli » et qui dit que cette affaire de volcan est d’abord la perception humaine qu’on lui confère. « C’est ce qui me plaît dans ce sujet », détaille Julien Mauve, « la dimension contemporaine. Le fait qu’il s’agisse d’une problématique environnementale qui pose des questions sociales et philosophiques… ». 

Avec leurs teintes cendrées et ténébreuses, ces photographies possèdent une esthétique qui évoque parfaitement la matière grise des volcans, comme si une couche de cendre s’était posée dessus avec le déclic du photographe. Elles nous rappellent sans cesse qu’une menace pèse ici et que celle-ci revêt néanmoins une beauté spectrale. 

Par Jean-Baptiste Gauvin