Blind Magazine : photography at first sight
Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

Comment éditer une série de portraits

Javier Sirvent is a photographer, photo editor and curator based in New York. His photographs and writings have been featured in publications such as TIME, TIME Lightbox, New York Magazine, among others. In the following interview, he gives his advice on editing photographs, sequencing a series of portraits and creating a portfolio. Learn how to build a strong portfolio and present it to professionals of the industry.

Quelles sont les premières étapes à suivre pour construire un portfolio ou une série d’images ?

La première étape est d’identifier l’objectif du portfolio et le public auquel il est destiné. Il peut s’agir d’un éditeur avec lequel on souhaite travailler, d’une galerie ou de clients potentiels à qui l’on souhaite le présenter lors d’un rendez-vous. Un portfolio peut donner un aperçu du travail accompli, mais il doit aussi refléter le genre de travail que l’on souhaite continuer à faire.

Ryan Eggold © Erik Tanner

Combien d’images faut-il généralement inclure dans la séquence d’un projet photographique et pourquoi ?

Je dirais qu’entre 20 et 30 images dans un portfolio suffisent pour donner un aperçu du travail d’un(e) photographe. Il s’agit de présenter uniquement les images les plus percutantes qui expriment un point de vue singulier.

Comment choisir ? Faut-il sélectionner uniquement les meilleures images ?

Absolument. La première étape est de choisir les images les plus pertinentes et de commencer à travailler à partir de là. Même s’il s’agit d’images issues de différents projets, l’idée est de mettre en valeur la singularité de son travail. La force et la qualité d’un portfolio se mesurent à l’aune des images les moins marquantes qui la constituent.

Une série d’images doit-elle être narrative ?

Pour les portraits, ce n’est pas un prérequis, cela dépend plutôt du travail présenté. Beaucoup de photographes utilisent le portrait comme moyen de transmettre une histoire, que ce soit par l’invention de personnages, l’usage de de références ou simplement en utilisant la lumière, la composition et la couleur pour construire un récit. L’enchaînement des images est un élément essentiel d’un portfolio. On peut par exemple opter pour une logique purement visuelle, ou alors raconter une histoire linéaire.

Snail Mail © Erik Tanner

Sur quels critères doit-on choisir la première et la dernière image ?

La première et la dernière image devraient être les plus marquantes de la série. L’idée étant de commencer la série par une image qui donne le ton et de terminer par une image qui restera “gravée” dans l’esprit du regardeur pendant quelques temps. La première et la dernière sont importantes, mais elles doivent également participer à la cohérence du portfolio dans son ensemble. Le regardeur s’intéressera toujours à l’aspect émotionnel d’une photographie, d’une expression, ainsi qu’à l’usage de la lumière et de la couleur.

Parlez-nous de la série la plus facile et la plus difficile que vous ayez eu à éditer avec des photographes ?

Les portfolios les plus faciles à réaliser sont ceux qui présentent un travail très cohérent ou unifié : par exemple, le travail d’un(e) photographe qui utilise des éclairages et des ambiances similaires sur un grand nombre de sujets. Cela permet de jouer avec des changements subtils d’humeur et d’expression, et cela permet surtout d’exprimer un état d’esprit, de démontrer une habileté technique. À l’inverse, il sera plus difficile de compiler des books dont les images sont très variées, les éléments complexes à assembler, et la trame narrative compliquée à élaborer. En réalité, il y a mille façons d’aborder la réalisation d’une série d’images. De manière générale, le photographe doit avoir une idée claire de ses intentions avant de compiler les images et de tenter différentes combinaisons.

Selon vous, quelle est la meilleure façon de compiler une série de portraits ?

Je conseille de commencer par sélectionner l’image qui va ouvrir la série et celle qui va la conclure, puis de choisir quelques images fortes qui auront de l’effet au milieu du book. Ensuite, c’est le moment de compiler les images, de les déplacer et de tenter plusieurs combinaisons. Prendre soin d’éviter les redondances ou les répétitions, et alterner entre des plans et des angles plus serrés et plus larges. Il est important de faire culminer la série sur une impression forte puis de réduire l’intensité avant de conclure de manière subtile. Mais, de nouveau, tout dépend du style de portrait avec lequel on travaille.

Josh Brolin © Erik Tanner

Comment les photographes doivent-ils se préparer avant de montrer leur travail aux professionnels de l’industrie photographique ?

La présentation est primordiale. Les professionnels seront sensibles à la manière dont un(e) photographe projette sa confiance à travers son travail et ils apprécieront sa maîtrise des outils utilisés pour transmettre un message. Attention, il ne s’agit pas de réaliser une présentation rigide ou trop formelle. En revanche, une rencontre en personne est à privilégier, car elle permet d’évaluer le travail et l’éthique d’un créateur. La façon dont un(e) photographe parle de ses thèmes et des idées autour de son travail est cruciale. Il faut se préparer à répondre à toutes sortes de questions.

Quelle est la meilleure façon de présenter un portfolio ? En version papier ou via une tablette ?

Il est préférable de présenter un portfolio de tirages imprimés, mais tout le monde n’a pas la possibilité de produire un portfolio constitué d’impressions grand format et de le mettre à jour régulièrement. Ceux qui apprécient la photographie aiment regarder des tirages. Mais ce n’est pas une obligation, car après tout, le travail doit se suffire à lui-même.

© Erik Tanner

Comment les photographes devraient-ils réagir au point de vue d’un professionnel ?

Il faut garder l’esprit ouvert et être prêt à accepter les critiques et les commentaires, quels qu’ils soient. Tout le monde ne partage pas le même point de vue sur la photographie. Il faut donc être conscient de qui l’on est, d’où l’on vient, et être capable d’articuler clairement ce que l’on essaye d’exprimer. Retenez surtout les commentaires constructifs, c’est à dire ceux qui vous aideront à progresser. Ayez confiance en vous, car en fin de compte, il s’agit de votre travail. Si vous essayez de plaire à tout le monde, votre travail ne vous mènera nulle part. 

En illustration des conseils de Javier Sirvent, voici un éditing type d’une série de portraits réalisés par Erik Tanner.

La photo de couverture de Jocelyne Beaudoin © Erik Tanner

Propos recueillis par Jonas Cuénin

Ne manquez pas les dernières actualités photographiques, inscrivez-vous à la newsletter de Blind.