
Curves, Floor, Gear, 2015 © Matthew Porter
Sur le sol rugueux d’un plancher en bois ou d’une dalle de béton, un amas de formes éparpillées. Des triangles, des cercles, des rectangles, des clés à molette, des chaînes, des limes, des pommes, des outils. A travers une composition faussement accidentelle, Matthew Porter fait coexister deux mondes : l’abstraction de formes élémentaires et la banalité de formes ordinaires. Ces images résument parfaitement l’oeuvre du photographe qui aime jouer des opposés et des contrastes. Ombre et lumière, planéité et relief, tradition et modernité, nature et culture. À la manière d’une peinture ou d’un collage, tout dans l’oeuvre de Matthew Porter révèle son sens aigu de la composition, du graphisme, du pittoresque.
Mais ici, il est surtout question de lumière. Le titre de l’exposition“The Sheen, The Shine”, littéralement “l’éclat et la brillance”, souligne l’attention toute particulière qu’il y accorde. La lumière permet certes à l’image d’exister mais surtout de révéler. Révéler l’éclat d’un miroir, l’aspérité d’une planche de bois, la froideur d’une pièce de métal, les courbes chaleureuses d’une pomme. Jouant des textures et des matériaux, la lumière permet à Matthew Porter de revisiter un répertoire formel intemporel.

File, Axe, Steel, 2018 © Matthew Porter
Hommage
Matthew Porter a réalisé ces photographies dans l’atelier de son père, un sculpteur marqué par les influences modernistes. Ces formes simples et pures nous font évidemment penser à Calder, Klee, Picasso, Braque. Mais aussi à ces artistes de l’école du Bauhaus en Allemagne dans les années 1920 qui contribuèrent à renouveler les arts visuels. Le titre de l’ouvrage de Kandinsky “Point et ligne sur plan” (1926) pourrait d’ailleurs être la légende de l’une de ses images.
Le photographe rend ici un double hommage : à son père, qui lui a montré la voie de la création artistique et aux grands noms de l’histoire de l’art moderne qui n’ont cessé d’expérimenter pour nous accompagner sur le chemin de l’abstraction. Cette boîte de pandore qui a libéré les formes et les esprits. Une révolution artistique qui fascine encore aujourd’hui et dont Matthew Porter se fait l’humble passeur.

Washers, Blocks, Copper, 2018 © Matthew Porter

Eggshells, Concrete, Apples, 2015 © Matthew Porter

Hold, 2018 © Matthew Porter

Bright Window, 2018 © Matthew Porter
Par Coline Olsina
Matthew Porter, The Sheen, The Shine
Du 18 janvier au 2 mars
Galerie Xippas, Rue des Sablons 6 & Rue des Bains 61, 1205, Genève, Suisse