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Photographie culinaire : plaisir des yeux

Photographie culinaire : plaisir des yeux

Découvrez le travail de femmes et de photographes non binaires qui transforment notre façon de voir la nourriture.
Rowdy Romenesco © Lauren Vied Allen

Celui qui a dit « On ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre » n’avait pas prévu l’obsession des réseaux sociaux pour la photographie culinaire. Notre désir de créer et de partager des images de nourriture témoigne d’un besoin de préserver nos souvenirs de vrais plaisirs, si éphémères soient-ils. Mais la photographie culinaire a une longue et fascinante histoire qui remonte aux premiers jours du médium, et elle s’est transformée pour répondre aux besoins de multiples industries au cours des deux siècles passés.

« La nourriture est une extension et une expression de nous-mêmes – une autre version du selfie. Il s’agit d’une auto-documentation : la preuve que nous étions là, ainsi que la célébration de nos diverses cultures », expliquent Keren Sachs, fondatrice et directrice générale de The Luupe, et Jon Feinstein, directeur de la stratégie, qui ont coorganisé la nouvelle exposition « Food Visions », exposée en ce moment au festival Photoville, à Brooklyn, en coordination avec Tracey Woods.

Visualizing Chakras-Chakras © Evi Abeler avec Anna Keville Joyce, set designer

Réunissant les œuvres de 14 artistes, dont Poupay Jutherat, Jessica Pettway, Evi Abeler et Penny De Los Santos, « Food Visions » explore comment les femmes et les personnes non binaires réinventent l’art de la photographie culinaire. Qu’ils traitent la nourriture comme un objet de convoitise, une friandise délectable, un pays des merveilles, un besoin vital ou un terrain de jeu grotesque, les photographes exposés ici se jouent des règles pour envisager de nouvelles façons de penser notre relation à la nourriture.

Une évolution du regard

Depuis la nuit des temps, les artistes ont compris le rôle central qu’occupe la nourriture dans notre existence. Elle peut être synonyme de plaisir, d’érotisme, d’extravagance ou d’opulence, mais aussi nous rappeler le caractère éphémère de la vie, nous avertir du déclin ou des dangers de la gourmandise. Elle peut évoquer notre éthique du travail, notre relation à la nature, la transformation de la société, et offrir un aperçu des genres, des cultures et des différences de classes sociales.

BananaMan © Poupay Jutharat

La photographie a toujours façonné notre relation à la nourriture et à la consommation, qu’il s’agisse de normaliser, romancer, rendre plus exotique ou diaboliser le lien qui nous unit à elle. « Nous aimons les mets et la photographie culinaire, et nous sommes inspirés par l’évolution constante de l’histoire du genre, en particulier à l’ère des réseaux sociaux », expliquent Keren Sachs et Jon Feinstein.

« Nous avons assisté à une nouvelle façon de penser la photographie commerciale de nature morte en tant que genre – qui, dans de nombreux cas, emprunte à d’autres genres et apporte une énergie nouvelle, vivifiante et souvent plus humoristique qu’il n’y paraît. Une façon de voir qui fait le lien entre beaux-arts, photographie commerciale et photographie documentaire. Une évolution du regard. Les photographes, les marques et les publications sortent de leurs zones de confort, et nous adorons ça. »

Un régal pour les yeux

Bag Lady © Akilah Townsend

Bien que de nombreux artistes présents dans l’exposition se considèrent comme des « photographes culinaires », certains s’essaient à d’autres genres et préfèrent simplement jouer avec la nourriture. Akilah Townsend, largement reconnue comme portraitiste, intègre un filet d’oranges au portrait d’une femme. Le photographe de rue Poupauy Jutharat trouve son bonheur en utilisant la nourriture comme un accessoire astucieux pour créer de nouvelles façons de voir les objets du quotidien.

Les photographes culinaires traditionnels comme Evi Abeler excellent dans la recherche de la beauté exquise de leurs sujets, révélant ainsi l’importance du dressage de l’assiette dans le plaisir de se sustenter. Nivi Shaham, en revanche, dans sa « série de combinaisons alimentaires bizarres » fait du fromage fondu sur des pancakes un mets surprenant.

Nacho Pancakes, de la série « Weird Food Combinations » © Nivi Shaham

« À travers toutes ces images, il y a un sens viscéral du toucher, de l’odorat et peut-être même de l’ouïe. C’est audacieux, lumineux, follement inattendu, tout en respectant une certaine tradition dans l’appréhension de l’espace, des formes et de l’éclairage. Ce mélange est une véritable source d’inspiration pour nous », déclarent Keren Sachs et Jon Feinstein. « Il est possible de représenter la nourriture de manières moins traditionnelles ou attendues. Il s’agit moins de coutumes devenant obsolètes que de la façon dont les nouvelles générations les empruntent ou les réinterprètent avec une énergie inédite. »

Par Miss Rosen

Miss Rosen est auteur. Basée à New York, elle écrit à propos de l’art, la photographie et la culture. Son travail a été publié dans des livres et des magazines, notamment TimeVogueArtsyApertureDazed et Vice.

« The Luupe Presents : Food Visions » est exposée à Photoville, Brooklyn, du 18 septembre au 21 décembre 2021.

Natures Rainbow Bounty © Penny De Los Santos
Breakfast © Jessica Pettway
Hello-Jello © Siobhan Beasley

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