Comment mener une interview

● Effectuez des recherches – Si vous interviewez quelqu’un que vous pouvez trouver sur Google, lisez le plus possible à son sujet. Si vous dénichez d’autres interviews, assurez-vous que vous n’allez pas poser des questions déjà entendues. Si vous interviewez une personne ordinaire, informez-vous sur le contexte par rapport à l’expérience de cette personne. La moindre des connaissances acquises sur le sujet peut vous aider.
● Demandez-vous quel est l’objectif principal de cet entretien et préparez quelques questions en guise de ligne directrice. Des questions générales pour briser la glace, puis d’autres qui doivent être directement liées aux raisons pour lesquelles vous interviewez cette personne. Cette liste sera la colonne vertébrale de l’entretien, mais elle devra être flexible.
● Expliquer au mieux comment l’entretien sera utilisé. La notion de « consentement éclairé » implique que la personne interrogée comprend les conséquences et ramifications potentielles de la publication de l’entretien. Il est de votre responsabilité de vous assurer qu’elle le comprend.
● Essayez de faire en sorte que l’entretien ne dépasse pas une heure. Ainsi, la personne interrogée ne sera pas trop fatiguée et la mise en forme ne vous prendra pas un temps infin. La personne peut cependant ne pas être disponible très longtemps. Dites-lui combien de temps approximativement l’entretien durera, afin que vous sachiez tous deux à quoi vous en tenir.
● Créez une relation. Vous vous retrouvez dans une pièce, avec cette personne. Vous devez lui donner une raison pour qu’elle vous dise quelque chose qu’elle ne dirait pas forcément à quelqu’un d’autre. Lors d’un entretien, vous déclenchez une dynamique similaire à celle d’une séance de pose pour un portrait. La personne réagit à votre présence, votre expression, vos gestes et à la façon dont vous vous tenez. Si vous êtes nerveux, votre interlocuteur le remarquera et pensera que vous ne savez pas ce que vous faites. Alors détendez-vous, et essayez de vous concentrer sur la relation avec la personne qui est en face de vous.

● Gardez le contact visuel et écoutez. Il est essentiel de faire sentir aux gens que ce qu’ils disent compte qu’ils sont importants en tant qu’individu, et pas seulement parce qu’ils font partie de telle ethnie / de telle classe d’âge ou qu’ils vivent dans tel ou tel quartier.
● Ne pensez pas à la prochaine question pendant qu’on vous parle. Votre interlocuteur mérite toute votre attention, et si vous ne l’écoutez pas, vous ne serez pas en mesure de formuler des questions de suivi. Les questions de suivi sont directement basées sur ce que la personne dit et comment elle le dit. Oui, vous devez avoir votre liste de questions, mais si vous rentrez chez vous avec les seules réponses à ces questions, l’entretien n’aura guère de sens. Cela signifiera que vous n’aurez obtenu que ce que vous attendiez. Une interview doit être synonyme de découverte.
● Réfléchissez à deux fois avant d’interrompre votre interlocuteur. En règle générale, il est bon de se taire et d’écouter. Si vous enregistrez pour faire un montage audio, vous ne pourrez pas utiliser les réponses complètes si vous les interrompez. Si l’interviewé s’éloigne du sujet, vous pouvez reprendre ce qu’il dit et essayer d’y revenir en posant une autre question. Lorsque la personne a fini de répondre, attendez quelques secondes avant de poser la question suivante. Les silences peuvent être révélateurs, et la personne peut alors réfléchir, avant d’ajouter quelque chose.
● Respectez les demandes d’anonymat de la personne interrogée, ou celles de ne pas divulguer certaines informations. Si la publication des informations qu’elle vous donne lui fait courir un risque, faites ce qu’il faut pour la protéger. Cela peut signifier, en dernier ressort, de ne pas utiliser l’entretien.
Comment formuler les questions

● Gardez à l’esprit la méthode des 5W (en anglais) du journalisme : Qui ? Quoi ? Où ? Quand ? Comment et Pourquoi ?
● Posez les questions auxquelles la personne est en mesure de répondre. J’essaie souvent d’amener les gens à me raconter des anecdotes qui peuvent transformer leur réponse en histoires aussi brèves que captivantes. Par exemple : « Où étiez-vous le soir des élections ? Avez-vous suivi les sondages ? Quel est l’événement politique le plus perturbant de cette année dont vous vous souviendrez ? »
● Formulez les questions de manière à éviter les réponses comme « oui » ou « non ». Au lieu de « Êtes-vous d’accord avec la récente loi qui restreint l’accès à l’avortement au Texas ? ». Demandez plutôt : « Que pensez-vous de la récente loi qui restreint l’accès à l’avortement au Texas ? »
● Ne suggérez pas la réponse dans la question. Les personnes doivent se sentir libres de répondre ce qu’elles veulent, sans se laisser influencer.
● Si vous pensez que vous allez utiliser votre enregistrement, demandez à l’interviewé de formuler des phrases complètes dans ses réponses. Par exemple, à la question : « Où êtes-vous né ? » Si la personne répond : « à Paris », vous n’avez aucun moyen d’utiliser cet élément d’information. Si elle répond : « Je suis né à Paris », vous l’avez ! Il peut arriver que vous souhaitiez conserver vos questions, mais faites un choix. Si vous gardez les questions, elles doivent être bien formulées, sous forme de phrases brèves qui vont droit au but.
Par Gaia Squarci
Gaia Squarci est photographe, et partage son temps entre Milan et New York, où elle enseigne le multimédia à l’International Center of Photography. Son travail a été publié, entre autres, dans le New York Times, le New Yorker, Time Magazine, Vogue, The Guardian et Der Spiegel.
