Comme s’il avait peur de l’objectif ou bien peur de l’époque, le petit Mattis se cache derrière les pieds d’une table quand Lucia Bartl le prend en photographie. C’est cette image qui a donné envie à la photographe de réaliser une série pendant cette période historique de confinement généralisé dans le pays où elle vit et travaille, en Allemagne.
Ses proches, ses voisins, les citadins qu’elle croise sur les rares trajets qu’elle fait témoignent tous de leur vive préoccupation du moment. Les visages sont souvent graves, profonds, impression accentuée par la blancheur nacrée de la lumière qui vient parfois les caresser. Ils font ce qu’ils ont à faire, mais on sent que quelque chose a changé, que quelque chose a altéré l’assurance ordinaire des jours d’avant.
Anna devait partir en voyage en Afrique et elle se demande quand elle pourra repartir. Inga est artiste. Toutes ses expositions ont été annulées, mais elle continue à travailler. Un homme joue du saxophone dans la rue et quand la photographe lui explique son projet, il lui lance : « je vais jouer du Blues alors ». Sentiment d’une certaine tristesse à voir le monde qu’on connaissait se dissoudre devant des heures inconnues. Mais certains philosophent, comme le compagnon de la photographe qui lui dit : « Dans cette période de distanciation sociale, la joie devient un acte de rébellion. Parfois c’est important de juste fermer les yeux et être heureux. Peu importe ce qui se passe dehors ».