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Le rôle de la photographie dans le journal d’Andy Warhol

Le rôle de la photographie dans le journal d’Andy Warhol

L’exposition « Andy Warhol: Photo Factory » présentée à New York offre un regard approfondi sur les liens solides que l’artiste a entretenu avec la photographie.
Auto-portrait en perruque d’épouvante, 1986 © The Andy Warhol Foundation for the Visual Arts, Inc.

Maître du journal intime, Andy Warhol comprend à son époque que l’art, l’histoire, aussi bien que la culture se nourrissent des expériences de la vie quotidienne. Grâce au Pop Art, les produits de consommation acquièrent un statut esthétique, le banal s’offre une postérité, comme si Warhol l’enfermait dans une capsule temporelle. De la même manière qu’il va trouver matière à écrire son journal The Andy Warhol Diaries – publié en 1987, après sa mort prématurée – dans ses allées et venues en ville, qu’il relate chaque jour, au téléphone, à l’écrivaine Pat Hackett.

Mais c’est à travers la pratique photographique de Warhol que s’exprime le mieux, peut-être, son désir de chroniquer la vie dans les années 1950. Cet aspect de son travail passe un peu inaperçu, quoique Warhol ait réalisé quelque 130 000 photographies 35mm en noir et blanc et 20 000 polaroïds entre le début des années 1970 et sa mort. Son Polaroid l’accompagne partout où il va, c’est – son « petit ami », comme il le nomme affectueusement.

Bananes, 1977-78 © The Andy Warhol Foundation for the Visual Arts, Inc.

Après le cinéma, Warhol se tourne vers la photographie, engrangeant les matériaux d’où naîtront ses portraits iconiques d’innombrables célébrités, de Marsha P. Johnson à  Muhammad Ali. Réaliser ses propres photographies s’est révélé être un moyen efficace pour éviter les procès pour violation de droits d’auteur intentés par des photographes tels que Patricia Caufield, Charles Moore, ou encore Fred Ward. Mais Warhol ne perd pas son intérêt, cependant, pour l’appropriation. Cette année, la Cour d’appel des Etats-Unis pour le deuxième circuit a confirmé une décision de 2019, selon laquelle la série « Prince Series » réalisée en 1984 dérive, sans transformation, d’une photographie de Lynn Goldsmith.

Boucler la boucle

Qu’il explore les limites de l’appropriation ou soit directement le sien, le travail de Warhol est marqué par son caractère particulièrement prolifique. Capitaliste dans l’âme, Andy Warhol s’empare des meilleurs moyens de production pour inaugurer une nouvelle étape de l’art à l’ère de la reproduction mécanique. Allant jusqu’à nommer son atelier « The Factory », Warhol et son équipe réalisent une quantité impressionnante d’œuvres d’art, de films, d’expositions, de livres et d’événements – devenus, pour la plupart, légendaires.

Grace Jones, 1984 © The Andy Warhol Foundation for the Visual Arts, Inc.
Keith Haring et Juan Dubose, 1983 © The Andy Warhol Foundation for the Visual Arts, Inc.

L’exposition intitulée « Andy Warhol: Photo Factory », présentée au musée Fotografiska de New York, rassemble plus de 120 œuvres de l’artiste (dont 20 n’ont jamais été montrées), et explore sa grande variété d’approches de la photographie : polaroids de personnalités phares telles que Grace Jones, Debbie Harry, Keith Haring, ou encore Jean-Michel Basquiat, bandes d’identités photomaton réalisées à Times Square dans les années 1960, tirages argentiques  représentant des scènes de la vie quotidienne, bouts d’essai en 16mm datant du milieu des années 1960 ainsi que les films eux-même. Sans oublier le dernier corpus d’œuvres de Warhol, présenté avant sa mort – une série de photographies cousues, dont il avait emprunté la technique à Christopher Makos, son collaborateur de longue date et son confident.

« Warhol était aussi infatigable que déterminé, et très vite, il a acquis ses propres appareils : des Polaroids et des appareil compacts », écrit Vince Aletti, curateur, collectionneur et critique, dans le catalogue de l’exposition. « ‘Une image est bonne, selon moi, lorsqu’elle est nette, et qu’elle représente une célébrité dans sa vie de tous les jours’, dit Warhol. ‘On est au bon endroit, au mauvais moment’. Warhol a toujours minimisé son habileté, la qualité de sa vision. Rien n’est laissé au hasard, mais il aimait jouer l’amateur naïf,  et redoutait d’être considéré comme un esthète averti. Il y avait clairement un peu des deux en lui. »

Par Miss Rosen

Miss Rosen est auteur. Basée à New York, elle écrit à propos de l’art, la photographie et la culture. Son travail a été publié dans des livres et des magazines, notamment TimeVogueArtsyApertureDazed et Vice.

« Andy Warhol: Photo Factory » est présentée au Fotografiska de New York jusqu’au 30 janvier 2022.

Dolly Parton © The Andy Warhol Foundation for the Visual Arts, Inc.
Jean-Michel Basquiat et sa mère, non daté © The Andy Warhol Foundation for the Visual Arts, Inc.

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