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Marvin Bonheur rend hommage aux passagers de la Gare du Nord

Marvin Bonheur rend hommage aux passagers de la Gare du Nord

Jusqu’à fin février, une exposition libre et gratuite du photographe Marvin Bonheur investit la Gare du Nord, à Paris. L’installation, portée par StatioNord et réalisée par le studio créatif du collectif Dysturb, met les passagers à l’honneur : ce sont 35 portraits des voyageurs dans leur environnement qui racontent leur rapport à la gare.

La Gare du Nord, ses voyageurs pressés, ses aurevoirs et ses retrouvailles. Une gare comme toutes les autres, ou presque : dans le hall immense, la foule est à l’image de Paris, cosmopolite. Il y a les habitués qui prennent tous les soirs le même train de banlieue pour rentrer chez eux, et ceux qui embarquent pour un long séjour à Londres ou Amsterdam, seuls, en couple ou en famille. Ils traversent la gare sans la voir ou s’émerveillent de son architecture. Ils sont irrités, enthousiastes, ou impatients. Chacun d’eux a, au fil de ses visites, tissé un rapport particulier à la gare, une histoire singulière faite de départs, de retours, de routine et de surprises. Et parmi eux, il y a Marvin Bonheur, photographe reporter, lauréat du prix du public du Festival Circulation(s) 2020. 

John © Marvin Bonheur

Enfant, Marvin Bonheur a passé beaucoup de temps dans le RER D, entre Paris, où sa mère travaille comme infirmière, près de la Gare du Nord, et le 93 , dont il est originaire. C’est justement son travail sur la Seine-Saint-Denis qui le révèle comme l’un des photographes les plus prometteurs de sa génération : des photos pleines de douceur, de mélancolie et d’humour, loin des clichés sur les quartiers dits difficiles. Installé à Paris, Marvin Bonheur continue de fréquenter la gare pour rendre visite à ses parents mais aussi aller là où ses projets photographiques le mènent: à Londres ou dans le Nord de la France. C’est donc naturellement qu’il a accepté l’invitation de StatioNord et de Dysturb et tourné son regard vers ce lieu qui a beaucoup compté dans sa vie : « Le projet me permet de véhiculer des idées qui me parlent beaucoup et de mettre en avant les passagers de la gare », explique le photographe.

Majda © Marvin Bonheur

Au mois d’octobre dernier, le photographe arpente la gare pendant trois jours avec la mission de représenter un échantillon fidèle des quelques 700 000 personnes qui la fréquentent quotidiennement. Il veut aussi connaître leur rapport à la gare et au voyage : cela devient un court témoignage qui accompagne chacune des photos. Il en résulte 35 portraits bruts, parfois poétiques, parfois drôles, où l’empreinte de Marvin Bonheur est instantanément reconnaissable : une photographie humaine, pleine de compassion, qui sublime les scènes urbaines. Plein phare sur la beauté surprenante des passants, les plus excentriques et les plus discrets. 

Olivier © Marvin Bonheur

Pour Marvin Bonheur, il importait d’avoir un casting le plus inclusif possible du point de vue de l’âge, de la couleur de peau, du style vestimentaire ou des origines sociales. La question de la représentativité est ainsi toujours au centre de son travail : « Tout est né dans le 93. Depuis le début, mon rapport à la photographie est proche de mon vécu d’homme noir, et tourne autour des parties de la population moins représentées et moins observées. »

Audrey and Cédric © Marvin Bonheur

Ce projet est l’occasion pour le photographe d’adresser une lettre d’amour au Paris qu’il préfère, au-delà des murs de la gare. Ce Paris cosmopolite et vivant, souvent éclipsé par l’image univoque du chic parisien. « À Londres, aux Etats-Unis et au Canada, j’ai rencontré cette idée stéréotypée d’un Paris d’homme blanc », dit-il. « Je ne veux pas tout déconstruire, mais il y a beaucoup d’évolution dans Paris. A l’étranger on est bloqué sur ce cliché-là, alors que l’énergie de Paris vient de son cosmopolitisme et de la diversité de sa population. » Marvin Bonheur soumet les stéréotypes les plus coriaces sur Paris et sa banlieue au traitement de sa photographie plurielle, vivante, dont les modèles ne se laissent jamais enfermer dans tel ou tel discours préconçu. Des photos en remède à une histoire unique. 

Johanna © Marvin Bonheur

Inclusive par son casting, l’exposition l’est aussi par son installation : libre et gratuite, elle n’est pas confinée entre les murs d’une galerie, où seuls les amateurs de photographie se rendraient. Les photos peuvent toucher un public plus large, celui qui ne ferait pas spontanément la démarche de passer le seuil d’un espace dédié. Pour Pierre Terdjman, du collectif Dysturb, dont le studio créatif a réalisé l’installation, il s’agit d’utiliser l’espace urbain pour des créations visuelles démocratiques et accessibles. Le tout, avec un splash de couleurs chatoyantes. « Pour apporter de la couleur, de la gaieté et du dynamisme. » 

Par Joy Majdalani

Joy Majdalani est une rédactrice et créatrice de contenu libanaise basée à Paris. Elle écrit sur la technologie, l’art, la culture et les questions sociales.

Marvin Bonheur, Gare du Nord
Jusqu’à fin février
Hall de la Gare du Nord, Paris
Plus d’informations sur SatioNord ici et Dysturb ici.

César © Marvin Bonheur
Camille © Marvin Bonheur
Valérie © Marvin Bonheur

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