

Une lourde larme qui coule sur la joue délicate d’une jolie femme… Voici un motif repris plusieurs fois par Anne Collier qui se plait à photographier les couvertures des magazines, les cartes postales, les posters, les affiches, les pochettes de disque, les livres anciens, les manuels, les calendriers des années 1960-1980. L’artiste y descelle l’imagerie liée à la femme et en révèle son utilisation en tant qu’objet de désir. En témoigne cette photographie d’une baigneuse nue en train d’entrer dans l’océan. Anne Collier sait trouver les représentations archétypales de la femme dans les images commerciales et, par ses installations, elle sait en rendre le substrat qui nous interroge, nous trouble, voire nous indigne.

Objectivation
Née en 1970 à Los Angeles, c’est au début des années 2000 que l’artiste entame ses recherches autour de la femme et de sa représentation dans l’imaginaire collectif. Bientôt, elle va dans des zones périphériques et ne se contente pas de clouer au pilori une société du marché tournée vers l’hédonisme et l’objectivation du corps de la femme. Elle pose aussi des questions sur le rôle du photographe et de son pouvoir de frappe avec l’image. Aussi, se prend-elle elle-même en photographie en train de photographier et aligne les clichés de femmes en train d’attraper une image à l’aide d’un imposant appareil photo. La femme devient alors la détentrice d’un pouvoir et Anne Collier semble nous dire que l’important n’est pas le sexe de la personne, mais bien plutôt qui possède le rôle, qui s’impose comme le preneur de photographies, donc le détenteur du pouvoir de photographier. C’est cette fonction que dénoncent finalement les images conceptuelles de l’artiste et les dérives d’un monde tourné résolument vers la photographie qui parfois en abuse.







Par Jean-Baptiste Gauvin
Anne Collier, Photographic
Du 23 février au 26 mai 2019
Fotomuseum Winterthur Grüzenstrasse 44, 8400 Winterthur, Suisse