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Florence Bourgeois : « Paris Photo est ouverte à toutes les formes de photographie »

Avec ses 191 exposants du monde entier, Paris Photo offre un panorama représentatif de la création photographique et visuelle du XIXe siècle à nos jours. Point de mire des nombreux événements photo qui essaiment dans la capitale française, la foire se fait aussi le reflet des questions qui traversent la société contemporaine avec son nouveau secteur dédié au digital. Quoi de neuf en 2023 ? Blind s’est entretenu avec Florence Bourgeois, sa directrice.

Comment se profile l’édition 2023 ?

Comme à notre habitude, nous avons travaillé à regénérer la foire parce que cela participe de sa fraicheur et c’est ce qui en fait un rendez-vous attendu. Cette année, le taux de renouvellement est conséquent puisqu’on compte 36 % de nouvelles galeries. Seize d’entre elles n’ont jamais participé à Paris Photo, comme 1Mira Madrid qui présente l’artiste marcheur Hamish Fulton et Albarrán Bourdais (Madrid) l’Espagnol Alberto García-Alix avec ses icônes ainsi que des œuvres inédites. Citons aussi les galeries Marshal (Los Angeles), Ryan Lee (New York). Et celles qui reviennent après quelques années d’absence, comme Kicken (Berlin), Jackson (Atlanta), ou encore Bruce Silverstein (New York). 

Autre particularité de cette édition, on compte 62 galeries françaises. Pourquoi cette forte présence nationale ?

Pour deux raisons. D’abord parce que nous sommes une foire française, c’est donc légitime. Et ensuite parce que le marché de la photographie est très important en France, tout comme aux Etats-Unis, pays qui représente la deuxième plus forte participation à égalité avec l’Allemagne avec 28 galeries. Ainsi Paris Photo donne un bon aperçu du marché de la photographie dans le monde. Cette année, les galeries italiennes sont particulièrement nombreuses aussi, avec principalement des travaux sur le paysage, notamment Guido Guidi, Luigi Ghirri et Francesco Jodice. Au total, les Européennes représentent deux tiers des galeries et on note le retour des Japonaises et des Argentines.

Krista Svalbonas, Würzburg II © Krista Svalbonas/Marshall Gallery, secteur principal
Luigi Ghirri, Lucerna Medium, 1972 © Eredi Luigi Ghirri/ Montrasio Arte Monza Milano, secteur principal

Quelles sont les nouveautés de cette édition 2023 ?

Aux trois secteurs habituels, le principal, Curiosa dédié à l’émergence et les éditeurs, s’ajoute un nouvel espace, dédié au digital, que nous avons confié à Nina Roehrs. Cofondatrice d’une galerie à Zurich, elle est spécialisée dans l’art numérique depuis 2016. Nous pensons qu’il est temps d’intégrer les créations croisant art et technologie. Et qu’il est pertinent de rendre compte de la manière dont le digital s’inscrit dans la photographie. Au même titre que nous nous intéressons aux artistes contemporains qui revisitent les techniques anciennes, les NFT et autres œuvres générées par l’intelligence artificielle font désormais partie des formes nouvelles que prennent les images. Paris Photo est une foire ouverte à toutes les photographies, du XIXe siècle au XXIe en passant par les avant-gardes modernes.

En termes de création, quelles tendances se dégagent ?

Signalons d’abord qu’il y a 20 solos shows. C’est important parce que c’est ce qui donne sa force à la foire. Parmi eux, dans les galeries françaises il y a Juergen Teller chez Suzanne Tarasieve, Hassan Hajjaj chez 193 Gallery, Samuel Fosso chez Christophe Person et Tom Wilkins chez Christian Berst Art Brut. Sans oublier le Français Vasantha Yogananthan, photographe choisi pour l’affiche de l’édition 2023 de Paris Photo, à la Photographers Gallery (Londres). Côté tendances, on constate que les œuvres à caractère politique et documentaire ont le vent en poupe. Les travaux personnels sur l’identité, sur le genre, le corps, la sexualité sont nombreux, à l’instar de Myriam Boulos chez Magnum et des artistes iraniennes à la Silk Road Gallery (Téhéran). Signalons la parution de Espace vital (éditions Textuel, 160 pages, 45 €), ouvrage dédié aux photographes iraniennes par Anahita Ghabaian Etehadieh. Par ailleurs, cette année les travaux sur le paysage sont nombreux. Parmi eux, le spectaculaire panoramique de 17 mètres de long de Pascal Convert chez RX. 

Robert Frank, Rodeo, Detroit © Andrea Frank Foundation/Courtesy Les Douches la Galerie, Paris, secteur principal
Graciela Iturbide, L’enlèvement, Juchitán [El rapto, Juchitán], 1986 © Graciela Iturbide/ courtesy Toluca Fine Art, secteur principal, parcours Elles x Paris Photo

Qu’en est-il du secteur des éditeurs ?

L’engouement ne se dément pas, aussi bien de la part des éditeurs, nombreux à vouloir participer à la foire – ils sont 36, soit un de plus qu’en 2022 –, mais aussi de la part du public. Année après année, l’attrait augmente. Les 300 séances de dédicace participent de ce dynamisme. Elles attirent beaucoup de monde, notamment ceux qui ne peuvent pas acheter un tirage. A partir de 20 ou 30 euros, on peut repartir avec un ouvrage signé.

Le parcours Elle x Paris Photo fête ses cinq ans. Quel bilan dressez-vous ?

La vocation de ce programme était d’augmenter la participation des artistes féminines sur la foire. C’est réussi : elles n’étaient que 20 % il y a 5 ans, aujourd’hui elles sont 36 %. Cela n’a cessé d’augmenter d’année en année. Nous sommes fiers de ces résultats et de notre engagement sur le long terme. Les galeries ont joué le jeu, tout comme la presse qui a donné de la visibilité à cette initiative soutenue dès le départ par le ministère de la Culture. Pour fêter cet anniversaire, nous sortons une publication (Elles, éditions Textuel, 312 pages, 39 €) avec le témoignage de 130 artistes parmi celles sélectionnées dans les différents parcours. S’ajoute le point de vue des cinq commissaires invitées, dont Fiona Rogers qui officie cette année. La curatrice de la Parasol Foundation Women in Photography au Victoria & Albert Museum a choisi 36 artistes parmi les quelque 300 présentes sur la foire en 2023. Notre ambition est de renforcer ce programme dans le futur avec d’autres actions qui pourraient par exemple inclure des institutions…

26e Paris Photo, Grand Palais Éphémère, Place Joffre, Paris 7e, du 9 au 12 novembre 2023

Omar Victor Diop & Lee Shulman, Being There © Omar Victor Diop & Lee Shulman, The Anonymous Project/Courtesy Galeries Binome & Magnin-A, Paris, secteur principal
Tabitha Soren, Emailed Kiss Goodnight, 2016 © Tabitha Soren/Jackson, secteur principal
KEVIN ABOSCH “Somewhere in Los Angeles: Basket”, 2023. Fine Art Print mounted on aluminium, behind acrylic glass, 150 x 225 cm. Edition 3 + 1 AP. NAGEL DRAXLER © Kevin Abosch and Galerie Nagel Draxler, Berlin/ Cologne/ Munich.

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