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Frank Ockenfels, introspection

À Fotografiska, le photographe Frank Ockenfels entreprend un voyage personnel à travers sa carrière.

Voir l’exposition Frank Ockenfels 3 à Fotografiska New York, c’est un peu comme être dans le secret. « Introspection » nous invite dans l’esprit du photographe, on y découvre ses moments privés, ses portraits pour lesquels il s’est fait connaître au cours de sa carrière de plus de trois décennies, ainsi que sa relation photographique de longue date avec David Bowie. L’exposition new yorkaise inaugure la première étape américaine de la tournée de l’exposition, qui a débuté au centre Fotografiska de Stockholm en 2021 et qui se rendra dans tous les sites internationaux du musée d’ici à 2026.

La nature intime de l’exposition est largement due à la présence de sélections de journaux d’Ockenfels, agrandis, scannés et encadrés au mur, un acte à la fois vulnérable et conflictuel. Au cours de sa carrière de plus de 30 ans, Ockenfels s’est emparé de grands carnets de croquis reliés en cuir et a produit des œuvres qui, comme il le dit lui-même, lui permettent de mettre de l’ordre dans ses propres pensées. Le résultat est souvent un collage d’images, de textes et de peintures, tous issus des rivières qui traversent son cerveau. Mais il existe aussi dans les images de David Bowie imprimées dans la chambre noire, dans les œuvres peintes à la main exposées dans l’une des galeries, dans les portraits qu’il choisit de montrer et dans ceux qu’il choisit de ne pas montrer. « Ma femme dit que c’est comme être dans ma tête parce que tout dans ma maison, ma vie est un chaos complet », dit-il en riant. 

« Il n’y a rien de nouveau dans ce que je fais. C’est juste que c’est un cerveau différent qui le fait. »

« Introspection » est aussi viscéral qu’inspirant. Le langage visuel d’Ockenfels, qui dit s’inspirer de Ralph Steadman, Francis Bacon et Jean-Michel Basquiat est marqué par la culture alternative et une soif perpétuelle de création et d’expérimentation. « Je repense à Sigmar Polke, qui faisait des trous dans les objets et utilisait ensuite les points, ou à Peter Beard, qui photographiait ses journaux intimes, puis y dessinait ou y apposait des empreintes de mains ensanglantées », explique-t-il. « Il n’y a rien de nouveau dans ce que je fais. C’est juste que c’est un cerveau différent qui le fait. »

© Frank Ockenfels 3, 42-43, 2019, Courtesy FaheyaKlein Gallery
© Frank Ockenfels 3, 42-43, 2019, Courtesy FaheyaKlein Gallery

« Inspirer les gens est bien plus intéressant pour moi »

Ockenfels était loin de penser que les galeries et les musées faisaient partie de son avenir. De fait, lorsque la galerie Fahey/Klein de Los Angeles l’a approché pour qu’il publie un livre de ses journaux – le volume3, paru en octobre 2019 -, il ne savait pas trop quoi dire. « À ce moment-là, j’avais fait quelques expositions de différentes choses dans différentes parties du monde, mais sans vraiment prendre cela au sérieux », a-t-il déclaré. « Je conservais des journaux sans vraiment penser que je les partagerais un jour avec quelqu’un d’autre. Je faisais simplement des choses pour me changer les idées. » Fahey/Klein lui a permis d’envisager son travail différemment, et l’exposition est maintenant en tournée.

© Frank Ockenfels 3, TRAIT POR 2020, Courtesy FaheyaKlein Gallery
© Frank Ockenfels 3, TRAIT POR 2020, Courtesy FaheyaKlein Gallery

Avec cette exposition, Ockenfels désire partager une histoire plus large sur sa carrière, dans l’espoir d’inspirer d’autres personnes. « Je ne sais pas comment on peut faire un livre dans la trentaine ou la quarantaine car j’estime personnellement que je n’en ai pas encore dit ou fait assez… Je veux dire, je peux vous montrer un tas de belles photos, mais je pense que mes expositions préférées sont celles où l’on vous montre le chemin parcouru par quelqu’un », dit-il.

Il était donc important pour l’artiste que l’exposition ne se limite pas à une collection de portraits de célébrités, bien que cela représente une grande (et belle) partie de son travail. « Il est très important pour moi que l’exposition ne soit pas une question d’ego…», explique-t-il. « Inspirer les gens est bien plus intéressant pour moi. Faire en sorte que les gens commencent à ouvrir leur esprit et à exprimer ce qu’ils ont en eux à travers l’art, c’est incroyable.»

Rétrospectivement, Ockenfels remarque qu’il se soucie désormais moins de plaire aux autres : « C’est ce qui caractérise les artistes : si vous décidez de faire quelque chose pour vous-même, vous ne devez pas vous soucier de ce que les autres vont en dire. Même aujourd’hui, lorsque je fais des choses, je ne pense pas vraiment à la façon dont les gens vont réagir. Je suis choqué de voir que les gens réagissent à certaines choses que j’aurais pu imaginer un jour dans ma tête et que j’aurais faites. »

© Frank Ockenfels 3, GEORGE CLOONEY 2005, Courtesy Fahey Klein Gallery
© Frank Ockenfels 3, GEORGE CLOONEY 2005, Courtesy Fahey Klein Gallery

L’oeuvre avant l’artiste

Ockenfels a commencé sa carrière à New York, et à la fin des années 1980, sa photo de Tracy Chapman pour Rolling Stone, initialement prévue pour un quart de page, est devenue une pleine page. Spin a suivi, ainsi que des collaborations avec des artistes tels que Yeah Yeah Yeahs, Alicia Keys, Jay Z et d’innombrables autres artistes de la scène, de l’écran et du studio. Il a commencé à réaliser des vidéos musicales et à créer des illustrations pour le cinéma et la télévision, notamment pour Breaking Bad, The Bear et American Horror Story.

En parcourant l’exposition, on découvre des œuvres qui lui ressemblent beaucoup plus : andes d’essai, autoportraits, collages et planches de skateboard peintes à la main côtoient des portraits de certains des plus grands noms d’Hollywood et de la musique, parmi lesquels George Clooney, Moby, Iggy Pop et Angelina Jolie.

Ockenfels ne s’est jamais réellement reconnu derrière une signature d’artiste. Souvent les gens connaissent ses images mais pas le nom de celui qui les a prises. Et c’est ce qu’il préfère. « Ce n’est pas si important. Ce qui compte, c’est que l’oeuvre soit intéressante, qu‘elle vous arrête et que vous ayez envie de la regarder. Et vous ne la regardez pas à cause de moi. »

© Frank Ockenfels 3, CENIT #2 2016, Courtesy FaheyaKlein Gallery
© Frank Ockenfels 3, CENIT #2 2016, Courtesy FaheyaKlein Gallery
© Frank Ockenfels 3, OBAMA 2008, Courtesy FaheyaKlein Gallery
© Frank Ockenfels 3, OBAMA 2008, Courtesy FaheyaKlein Gallery

Frank Ockenfels 3 – Introspection, Fotografiska New York. L’exposition se poursuit jusqu’en mars 2024.

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